Avec ce magnifique ouvrage, Jean Delize nous (re)-plonge dans l’univers singulier et passionnant de la U-Bootewaffe durant la Seconde Guerre mondiale.
Spécialiste des marines françaises, anglaises et allemandes, Jean Delize livre dans Les hommes des U-Boote un travail inédit, remarquable et superbement illustré par nombreuses photos (manœuvres, combats, plongées, portraits mais aussi objets). Il est vrai que le sujet, passionnant au demeurant, a largement été traité à travers d’innombrables livres consacrés aux grandes batailles livrées par les « Loups gris » de Dönitz dans l’Atlantique et ailleurs. On croyait ainsi tout savoir de ces sous-marins, des As et de leurs machines. Bien plus qu’un ouvrage supplémentaire sur la question, l’auteur pénètre véritablement dans l’intimité de ces combattants de l’impossible en observant les hommes, du machiniste à l’emblématique « Kaleunt » (Kapitän-Leutnant).
Pour la première fois en langue française, l’auteur nous offre une vision « de l’intérieur » : quelle fut la formation des officiers et des sous-mariniers ? Comment cette Arme a-t-elle évolué tout au long de la guerre ? Quels rapports entretenaient ces soldats singuliers qui avaient un statut « à part » dans la Wehrmacht ? Comment vivaient ces hommes dans leurs sous-marins ?
La renaissance de cette Arme de prestige est due à deux facteurs fondamentaux. Dans un premier temps, et logiquement, la U-Bootewaffe est l’héritière de sa brillante aînée de la Grande Guerre. Grâce à l’expérience acquise durant les années 1914-1918, la Kriegsmarine profite de cadres excellents pour la formation de ses hommes. D’autre part, l’Allemagne sait contourner les inspections alliées qui doivent vérifier que les clauses du Traité de Versailles sont appliquées. Comme souvent en histoire militaire, la volonté irréductible d’un homme peut bouleverser la destinée d’une Arme. Karl Dönitz va imposer sa stratégie sous-marine qui prendra le pas sur la surface. S’immisçant dans le quotidien souvent « étroit » des officiers, Jean Delize dépeint l’esprit de corps de cette Arme, singulier jusqu’au port non réglementaire de la casquette blanche du « Kaleunt » habituellement réservée à la tenue d’été.
Centre privilégié de cet ouvrage, les sous-mariniers, du commandant à l’équipage, entretiennent des relations atypiques dans la Wehrmacht, à commencer par celles du « Lion » Dönitz avec ses commandants de U-Boote qu’il reçoit personnellement à chaque retour de mission. « La liberté de ton, sans a priori ni idée préconçue met en valeur l’expérience », principe que l’on retrouve dans d’autres marines de guerre, au-delà de la Seconde Guerre mondiale. Mais la machine n’est pas pour autant laissée de côté. Jean Delize revient sur les éléments clefs du U-Boot : transmettre, se cacher, viser, tirer et réparer. En outre, quelques doubles pages superbement illustrées nous permettent d’en savoir un peu plus sur quelques spécialités propres à l’arme sous-marine.
L’auteur revient enfin, sur le rôle du sous-marin et ses différents types de missions. De l’effervescence des appareillages aux plongées, l’auteur nous fait vivre l’excitation du départ et l’atmosphère moite de l’univers verrouillé des U-Boote. Les patrouilles sont longues et Jean Delize nous fait passer une journée type dans le bâtiment, entre les tiers de quarts, les parties de cartes qui permettent de tuer les interminables heures d’attente, si insupportables, qu’une alerte et un danger imminent sont presque toujours attendus avec impatience. Alors la « chasse » peut commencer…
Les hommes des U-Boote, la vie quotidienne à bord des sous-marins du IIIe Reich, Histoire & Collections, 127 pages, 38,95 €.